LA BD:
C'est quoi : LA GESTE DES CHEVALIERS DRAGONS
C'est de qui : Ange, toute une flopée de dessinateurs, et S. Paitreau à la colo
En guise de première partie de conclusion (si, si, promis!) à cette saga de l'été, je voudrais revenir sur quelques points qui sont soit importants pour la lecture des albums déjà publiés ou pour les prochains, soit curieux (erreurs des auteurs ou mauvaises lectures et/ou incompréhensions de ma part).
Importants tout au long de la série :
- Les dragons : il n'y a pas un seul modèle de dragon. L'imaginaire de chaque dessinateur y est sans doute pour beaucoup. Ailé ou non, cracheur de flammes ou non, cornu ou pas, avec ou sans crête, ces charmantes bestioles vont du lézard surgonflé au gigantesque cauchemar volant à 6 yeux en passant par le yong coréen. Un point est apparu rapidement dans l'album 13 : les dragons apparaissent le long de lignes sur la carte (des méridiens du monde?)… Il ne semble pas avoir été repris par Ange depuis.
- Le Veill : cette aura des dragons qui contamine leur entourage et grandit en force avec la puissance de la bête. Personne ne sait vraiment comment agit le Veill : certains êtres sont touchés immédiatement, d'autres après une longue durée; certains êtres sont touchés physiquement, d'autres mentalement ou les 2 ensemble.
- La virginité des chevaliers dragons : seules les vierges ne sont pas touchées par le Veill et peuvent approcher des dragons… bien que la proximité des dragons puisse leur provoquer des cauchemars (le plus souvent des réminiscences du passé).
- Les épées : seules les armes faites en écailles de dragon ou dans un métal créé par le Veill peuvent traverser la carapace des dragons. 3 armes historiques ont été faites avec le premier métal trouvé : 2 épées et 1 hache. Une épée peut être transmise de chevalier à chevalier. Mais quand l'une d'elle meurt face à un dragon, ses compagnes marquent sa tombe avec son épée ou l'incinère avec.
- La politique : officiellement, l'ordre ne se mêle pas de politique, mais en réalité celle-ci est omniprésente. De plus comme le dit Oris dans le tome 2 : "un acte public, quel qu'il soit, est toujours politique." Ce qui explique l'hostilité de l'ordre religieux d'Aman ou de certains dirigeants à diverses époques envers l'ordre.
- La corruption : elle existe un peu partout (ordres religieux, dirigeants ou fonctionnaires des cités). Côté ordre des chevaliers dragons, il y a beaucoup d'hypocrisie : les chevaliers ont interdiction d'accepter des dons d'argent mais elles peuvent recevoir des cadeaux "symboliques" comme vêtements, armes, denrées à manger ou à boire… à condition que cela ne soit pas trop voyant auquel cas elles devront tout donner au trésor de l'ordre. Comme le dit la très vieille Oris dans le tome19 : "La prochaine fois, elles n'auront qu'à mieux dissimuler leurs bêtises…"
- La sexualité : elle est sous-jacente plus d'une fois dans la série. D'abord au sein de l'ordre : soit par des pratiques hétérosexuelles protégeant la virginité (voir Eléanor dans le tome 19: "Rien en-dessous de la ceinture"), soit par des pratiques homosexuelles plus ou moins cachées. Hors de l'ordre: mariages forcés, polygamies, viols, dons d'êtres humains… reviennent plus d'une fois dans les albums.
- La misogynie : mis à part les chevaliers dragons, la position des femmes n'est pas vraiment enviable dans la plupart des lieux rencontrés dans la série. Les prêtres d'Aman maintiennent des règles tenant la femme en position de faiblesse vis-à-vis des hommes. Le mariage les met sous la tutelle de leur époux après celles de leurs pères ou leurs frères. Dans beaucoup de villes, les femmes doivent avoir une tenue chaste et décente (comportement et vêtements). Mais, curieusement, Messara a une impératrice dirigeant la partie ouest du monde au moment de la guerre des Sardes… Comme disait La Fontaine dans la fable "Les animaux malades de la peste" : "Selon que vous serez puissant ou misérable, / Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir."
- Les sciences : le monde des chevaliers dragons est dans un contexte plutôt médiéval où les études scientifiques ne semblent pas être faites au grand jour (voir Hassan dans le tome 9 et les allusions faites à ses écrits dans les tomes 13 et 19). Seule la cartographie du monde semble être couramment pratiquée (même si les auteurs ne nous ont pas encore donné une carte du monde). L'utilisation de tisanes ou drogues sans doute issues des plantes est utilisée pour soigner et sans doute aussi des onguents ou cataplasmes.
- Les arts et artisanats : le travail des métaux ou des tissus ou du verre, la fabrication du papier, la construction de bâtiments, la fabrication de meubles ou de bijoux… sont florissants et ont générés quelques merveilles. Des artistes réputés sculptent, peignent ou, sans doute, composent (plus difficile à représenter en BD!)
- La magie : elle est sous-jacente dans certains albums comme le 1e où la ville est protégée des chutes d'eau par un sort si l'on en croit les prêtres d'Aman. Ellys peut devenir enceinte grâce à un collier magique dans le tome 12. Le fonctionnement des bateaux volants, évoqué dans le tome 19, est lié à la magie des routes de pierres rouges qu'ils sont obligés de suivre. Sans doute, une persistance des pratiques religieuse et magiques des Nauris du tome 6. Le capitaine du vaisseau résume ainsi : "Vous ne savez pas pourquoi les dragons apparaissent… et nous ignorons pourquoi nos vaisseaux volent."
- Les sardes : ce peuple de pillards nomades vivant dans le désert est cité quelques fois avant d'apparaître dans le tome 11 et d'être en permanence soit physiquement, soit en citation dans d'autres tomes puisque ce sont les ennemis de l'empire de Messara pour la guerre de 1000 ans.
- La liste n'est sans doute par complète. À chacun de rajouter ses points marquants manquants.
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Nous avons eu la chance de pouvoir échanger avec le scénariste Ange (la partie féminine du duo) et voici ses commentaires et éclaircissements :
"Analyse extrêmement intéressante et complète ! Merci Gen !
J’en profite pour rajouter quelques points qui intéresseront peut-être les Nerds de la Geste. ;)
L’univers de la Geste s’étale sur 12 000 ans environ, de l’histoire de « La Première », à l’époque actuelle. L’époque actuelle, dans la Geste, évolue constamment : elle correspond à l’album le plus avancé chronologiquement dans notre histoire. Pour l’instant, « l’époque actuelle » est la Guerre des Sardes ; il n’y a rien de publié qui se passe « après »… cela va changer bien sûr.
Dans les pages de garde des albums, tu trouveras maintenant les histoires classées par ordre chronologique, donc de « La Première » (- 11 000 ans) à « Naissance d’un Empire », + 628 dans notre chronologie non officielle.
L’an zéro correspond au premier album de la Geste.
Il y plusieurs époques dans notre série :
- D’abord, l’avant premier tome... La préhistoire (avec « La Première »), la création de l’Ordre des Chevaliers Dragon (dont on voit la légende dans « La Faucheuse d’Ishtar », et ses débuts difficiles (illustrés dans « Par delà les Montagnes »). Au moment de la création de l’Ordre, Messara est une petite ville, dirigée par un petit roi. Mais la montée en puissance de l’Ordre des Chevaliers Dragons, dont le premier Ordre est installé à Messara, donne à la cité l’impulsion pour devenir une puissance militaire… puis un Empire.
- Ensuite vient « notre époque narrative numéro un ». C’est l’an zéro de notre chronologie non officielle, l’époque de « Jaïna » (le tome 1), la première époque où nous nous sommes arrêtés. L’époque classique, l’âge d’or de l’Ordre des Chevaliers Dragons. Là, nous avons écrits toute une série d’albums dont les histoires s’enchevêtrent sur une période de soixante ans environ… (« Brisken », « Aveugles », « Jaïna », « Akanah », «Le Pays de Non Vie », « les Jardins du Palais »). C’est l’époque de la bataille de Brisken et de ses conséquences, ce sont les histoires de Jaïna, d’Ellys, d’Akanah et d’Eléanor.
Et d’Oris qui est le Chevalier Dragon qu’on voit le plus dans la Geste. Oris apparaît à peu près dans tous les albums de cette époque, à des âges divers. C’est notre Chevalier préféré !
Un Empereur, celui qui a trahi les Chevaliers à Brisken, est à la tête de l’Empire de Messara, qui sera ensuite nommé simplement « l’Empire », puis « L’Empire d’Occident » après la scission.
- Ensuite… six cent ans passent. Certains albums non reliés aux autres, comme « La Déesse », « La Porte du Nord », « Revoir le Soleil », sont placés entre les deux époques majeures.
- Puis vient notre « époque narrative numéro deux », celle de la Guerre des Sardes. Là encore nous nous arrêtons pour toute une série d’albums dont les histoires s’enchevêtrent sur une période de cinquante ans. « La Guerre des Sardes » bien sûr, mais aussi « Toutes les Mille et Une Lunes », « La Mer Close », « L’Ennemi », « Vers la Lumière » « Naissance d’un Empire », et même certaines parties de « La Première » qui montrent Amarelle enfant.
Oris était le personnage clé de la première période narrative, Amarelle est le personnage clé de cette période ci. C’est le moment du schisme, et de la séparation de l’Ordre des Chevaliers Dragons en deux organisations rivales : l’Ordre des Chevaliers Dragons d’Orient et l’Ordre des Chevaliers Dragons d’Occident… qui vont se haïr et se combattre. Et il y a maintenant deux Empires. L’empire d’Occident (l’ancien Empire) est dirigé par une femme, Helsana.
Pour l’instant, la chronologie s’arrête là – il n’y a pas d’album publié qui se déroule après la mort d’Amarelle. Mais deux d’entre eux sont en cours de réalisation.
Tout cela pour dire que certaines des différences culturelles entre les albums de La Geste des Chevaliers Dragons sont des différences d’époques. En 12 000 ans, beaucoup de choses changent, et même en six cents.
Nous faisons bien attention à faire évoluer les rituels, les habitudes et les traditions… il ne serait pas crédible que deux Ordres séparés de mille kilomètres et de sept cent ans aient les mêmes habitudes.
Et quant aux femmes (bien vu !), en l’an – 400 (« Par delà les Montagnes ») elles n’ont pas le droit d’entrer dans les auberges non accompagnées, en l’an zéro c’est un Empereur sur le trône et les femmes commencent à se battre pour leurs droits (la Comtesse de Cressay dans « Aveugles ») et six cent ans plus tard, une femme est impératrice.
La magie existe en effet mais elle est légère, et parfois, elle n’est qu’un mensonge. Comme le collier qui permet à Ellys de tomber enceinte dans le Tome 12. (Ne le répétez pas, mais la voyante n’a fait qu’un peu de travail psychologique…)"
2e partie de cette conclusion à paraître en début de semaine prochaine.
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Une chronique de Gen, commentée par Ange