Ca donne Quoi ? Alex et Alice sont deux bourgeois parisiens, cadres désabusés qui, suite à un accident mortel dont ils sont fortuitement à l’origine, vont entamer une spirale destructrice à base de tromperie, adultère, autodestruction et meurtre.
Voilà, en substance, le pitch de cet album très noir signé Cadène et Sécheresse qui analyse cliniquement la désagrégation d’un couple qui a toutes les cartes en main pour être heureux mais se complait dans une morgue extrême et un déni des valeurs de la société, pour se sentir exister.
Si l’exercice de style est intéressant par moment il est, à mon goût, trop désespéré et manque d’un petit quelque chose qui ferait que le lecteur pourrait y trouver matière à réflexion plus poussée.
Le trait de Sécheresse, toujours aussi délié qu'il peut être torturé, est ici souvent fulgurant, fort bien mis en couleurs, et traduit par ses lignes lâchées et chaotiques, toute la folie du propos.
LA MUSIQUE:
C'est quoi :YOU WERE NEVER REALLY HERE
C'est de qui ? J. Greenwood
La Couv':
Déjà entendu chez B.O BD? Oui.
On peut écouter ?
Ca donne Quoi ? Autre œuvre noire et particulière, le thriller You were never really here part lui aussi d’un scénar lambda mais souffre d’un traitement jusqu’au boutiste.
A l’image de la B.O, signée par le génial guitariste de Radiohead qui retrouve là à la fois la flamboyance de There will be blood et l’expérimentalisme de Body Song.
Partition hallucinée passant d’un formalisme noir glaçant à des expériences sonores à cheval entre sérialisme et improvisation, l’ensemble, malgré une diversité déroutante, fait preuve d’une unité rare et diablement prenante.
Grennwood torture ses instruments, tape dans les mains, désaccorde sa guitare, soigne sa post prod, lèche ses arrangements et propose au final une musique aussi barrée et déprimante que le film qu’elle illustre.
Un bel effort d’un artiste toujours passionnant qui a apporté une belle dimension à La Guerre.
Ca donne Quoi ? Nick est atteint d’une maladie peu commune et assez envahissante : il se souvient d’absolument tout ce qui lui est arrivé.
Forcé d’avoir recours à des boites vides où il « range » ses souvenirs, son existence est parcourue de petits jobs sans suite, et d’un effort constant pour faire le vide dans une tête trop pleine.
Jusqu’au jour où son hypermnésie, et son passé, vont lui attirer l’attention de gens peu recommandables qui semblent avoir besoin d’informations enfouies dans les milliers de souvenirs de notre protagoniste.
Corbeyran tenait là un sujet intéressant et propice à développer des pistes prometteuses mais après une fausse (piste donc) le scénario part sur quelque chose de plus commun qui, après la –longue- mise en place en début d’album, laisse le lecteur quelque peu frustré.
Le trait de Winoc, que l’on avait découvert chez nous avec Le Postello, reste dans le style réaliste sans encrage qui fait l’originalité de son auteur et sert plutôt bien son propos.
LA MUSIQUE:
C'est quoi : PRISONERS
C'est de qui ? J. Johansson
La Couv':
Déjà entendu chez B.O BD? Oui
On peut écouter ?
Ca donne Quoi ? Prisoners est parmi les premiers films qui ont fait connaître le compositeur islandais à l’international.
Il y alterne les passages acoustiques - avec un violoncelle lugubre et trainant comme instrument soliste, accompagné de voix éthérées -et ce qui va devenir l’une de ses signatures jusqu’à sa disparition prématurée : des nappes électroniques grondantes semblable à des sons de drones, qui installent une tension palpable.
Tout comme De Mémoire, la B.O de Prisoners est construite en lente montée du suspense, avec des plages plus atmosphériques au calme ambiant mais relatif, plein de montées de cordes quasi lyriques, et des passages plus violents, que ce soit dans l’intensité ou les mélodies.
Ca donne Quoi ? Ça sent la fin de parcours pour la communauté du Grass Kingdom avec l’arrivée de forces gouvernementales lourdement armées qui veulent capturer celui qui semble être le tueur psychopathe responsable de la vague de crimes qui a frappé la région depuis plusieurs années.
Si Robert et le reste des habitants du Royaume sont prèts à défendre chèrement leur indépendance, Bruce de son côté est parti enquêter à Cargill où il fait de terribles découvertes sur les Humbert père et fils et sur la véritable identité de l’assassin.
Kindt et Jenkin concluent leur trilogie noire de façon aussi spectaculaire que morbide avec d’un côté l’affrontement armé entre militaires et assiégés et de l’autre l’inexorable avancée vers les révélations.
Grass Kings confirme être un récit fort, riche de ses études de personnages comme de son background atypique et sauvage.
Assurément une autre image de l’Amérique.
LA MUSIQUE:
C'est quoi :MEMENTO
C'est de qui ?D. Julyan
La Couv':
Déjà entendu dans le coin? Une paire de fois je dirais.
On peut écouter ?
Ca donne Quoi ? S’il a touché à tous les genres, de la fantasy à petit budget à l’épouvante bis en passant par la comédie et même le film de guerre, c’est avec Christopher Nolan que David Julyan a probablement produit ses meilleures B.O.
Après deux courts métrages ensemble, nos deux compères sautent le pas du grand écran avec Memento thriller psychologique tendu et nerveux construit de façon non linéaire.
Julyan, adepte des mélanges de technique, prend le film à contrepied en gardant une unité chronologique à son score où acoustique et électronique font plutôt bon ménage même si cette seconde catégorie se taille la part du lion.
Le compositeur crée des atmosphères stéréoscopiques et stressantes qui ne sont pas parfois sans faire penser à certaines compositions de Nine Inch Nails, le combo de Trent Reznor, lui aussi passé à la B.O depuis quelques années.
Apothéose de noirceur musicale et bédéphile garantie avec le couple du jour !
Ca donne Quoi ? Depuis pas mal d’années et les premiers succès de gens comme Grangié par exemple le thriller a le vent en poupe. Si le cinéma s’est rapidement intéressé à ces mannes à frics, il a fallu attendre les adaptations des best-sellers de Stieg Larsson pour voir le phénomène se développer dans la BD.
Aujourd’hui c’est un roman de Franck Thilliez, co adapté par lui même, que nous propose Ankama, qui a semble t-il décidé de développer dans le domaine.
Un groupe de 8 personnes se retrouve impliqué dans une sorte de jeu de rôle grandeur nature ultra secret où ils vont devoir résoudre d’étranges énigmes s’ils veulent trouver les clés leur permettant de gagner 300 000 euros. Rapidement faits inquiétants et autres faux-semblants vont mettre leur nerfs et leur équilibre mental à rude épreuve, rendant les limites entre jeu et réalité bien tenues.
Pour un coup d’essai c’est plutôt bien foutu, le style graphique hybride de Mig, spécialisé dans le manga depuis pas mal d’années, donne une personnalité inattendue à un scénario qu’un trait plus classique franco-belge n’aurait pas forcement mieux servi.
L’histoire fonctionne sur des fils devenus des classiques : pèle mêle on citera l’amnésie, le monde du jeu virtuel/spectacle -égalité, le huis-clos tendu, le lieu – un asile désaffecté – bien flippant, les personnalités aux antipodes des protagonistes… et, si je ne suis pas client du genre il faut reconnaître que la mécanique est bien huilée et le suspense maintenu d’un bout à ‘autre même si certaines influences (Usual Suspects, Shutter Island,…) sont assez évidentes.
LA MUSIQUE
C'est Quoi ? LES RIVIERES POURPRES 2
C'est de Qui ? Colin Towns
La couv'
Déjà entendu sur B.O BD? Non
On peut écouter? Via Deezer par exemple vu qu'il n'y a pas d'extraits vidéo dispos, du coup je vous propose tout de même la Bande annonce:
Ca donne Quoi ? Si on a perdu en subtilité et en originalité entre les B.O du premier et second Rivières Pourpres (et entre les films et leurs interprètes aussi soyons clairs), coté métier et efficacité Colin Towns n’a pas trop à rougir face à Bruno Coulais.
Sa partition joue sur les codes du thriller en mettant à bon escient l’orchestre symphonique, les cordes en tête. Un peu d’électronique de ci de là pour insister sur ses effets de suspense et son ambiance lourde finissent de faire d’en faire un score quasi exclusivement illustratif mais relativement honnête et tout à fait à sa place en fond sonore de Puzzle.
Ça donne Quoi ? Entre le déces de sa mère, la rentrée au lycée et la lugubre suite de meurtres qui frappe la ville, Drazig, adolescent taciturne, n’a pas la forme. Attiré par ce sordide fait divers, notre jeune héros va se lancer dans sa propre enquête au risque d’aller trop loin.
Le Corps à L’Ombre est un mélange original de récit initiatique, de transition entre enfance innocente et âge adulte, et d’histoire de serial Killer, même si ce dernier aspect est trop classique à mon goût: on découvre assez rapidement qui est le coupable et certains points sont survolés, mais ce n'est clairement pas l'intérêt principal de cet album dont le style animalier et le ton décalé font beaucoup penser aux Lapinots de Trondheim.
LA MUSIQUE
C'est Quoi ?CRACKS
C'est de Qui ? J. Navarrete
La couv'
Déjà entendu sur B.O BD ? Oui
On peut écouter?
Ca donne Quoi ? Auréolé de sa nomination aux Oscars pour le score du labyrinthe de Pan, qui l’a propulsé sur le devant de la scène européenne (la traversée de l’Atlantique ne tardera d’ailleurs pas), Navarrete écrit pour ce thriller psychologique (avec une Eva Green complètement dans son élément) une musique très classique (au sens noble du terme), qui n’est pas sans rappeler les travaux de ses homologues britanniques.
Quand le piano n’est pas seul sur quelques pistes aux thématiques mélancoliques appuyées, il est rejoint par une section de cordes et/ou de vents qui apportent des accents tantôt dramatiques tantôt –plus rarement- effrayants. On est parfois dans l’underscoring, voire le minimalisme, mais quelques envolées lyriques voire dansantes font que la galette ne se résume clairement pas à ça.
Une B.O peut être un peu inattendue sur Le Corps à L’Ombre mais qui en rehausse l’originalité.
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Conseils d'écoutes musicales pour Bandes Dessinées
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"...ces illustrations sonores. On apprend toujours quelque chose avec elles. Y compris sur des œuvres qu'on a soi-même écrites." Serge Lehman. (La Brigade Chimérique, Metropolis, L'Homme Truqué)