LA BD:
C'est quoi ? FRITZ LANG LE MAUDIT.
C'est de qui ? Delalande & Liberge
La Couv':
C’est édité chez qui ? Les Arènes
Déjà croisés sur le site? Oui, ensemble même, déjà aux Arènes BD d'ailleurs.
Une planche:
Ca donne Quoi ? Les lecteurs de B.O BD qui viennent depuis un petit moment par ici savent que votre serviteur est un amateur (éclairé ?) de cinéma, surtout old school.
A l’époque aussi bénie que lointaine où j’étudiais le cinéma sur les bancs de l’école, la filmo de Fritz Lang était un passage obligé – M le Maudit est d’ailleurs resté au programme du bac audiovisuel un moment- et la découverte de l’expressionisme allemand sur grand écran m’a durablement marqué ; les Docteur Mabuse (surtout le premier, muet) ont clairement été une de mes premières grandes révélations, autant que les Ivan le Terrible d’Eisenstein, de l’autre coté de la Volga.
C’est donc avec un plaisir non dissimulé que j’ai dévoré cette « bio » de l’un des plus grands réalisateurs allemands, voire mondiaux, sous la plume d’Arnaud Delalande, féru d’Histoire que l’on a croisé sur de très bonnes choses chez nous et qui retrouve ici Eric Liberge, déjà illustrateur de la Jeunesse de Staline et du Cas Alan Turing.
Le scénario s’intéresse à la jeunesse et à la période germanique du réalisateur, évoquant son expérience comme soldat, la mort de sa première épouse, nimbée d’un certain mystère et élément important dans l’œuvre future du cinéaste… époque qui voit également la montée du nazisme en Allemagne que Lang finira par fuir pluytôt que de se retrouver embrigadé dans du cinéma de propagande aussi dégradant que dangereux (le sus-cité Eisenstein n’aura d’ailleurs pas cette chance et en fera quelque peu les frais).
On assiste aussi à sa rencontre explosive avec Théa Von Harbou, écrivaine et scénariste qui, elle, succombera aux sirènes du fascisme ; à ses premiers revers, ses premiers succès, la mégalomanie du tournage de Métropolis, chef d’œuvre visionnaire s’il en est.
Et en constante parallèle à l’avènement des doctrines d’Hitler et ses conséquences sur l’Europe.
L’évocation est aussi réussie que fascinante, à l’image du sujet, et donne l’occasion à Liberge de livrer de superbes planches où, dans un Berlin redue avec conviction, il reprend l’iconographie expressionniste des films de Lang, mais pas que puisque l’on croise aussi pèle mêle le Nosferatu de Murnau, le docteur Caligari de Wiene ou encore le Golem de Wegener que l’artiste superpose à la figure du futur dictateur.
Il capte à merveille le style de l’époque et s’approprie les images sans pour autant faire dans le photoréalisme sur lequel j’ai parfois tiqué dans certains de ses ouvrages précédents.
Au rayon des bémols j’ai moins aimé le fil rouge de l’inspecteur qui s’acharne sur Lang par rapport à la mort de sa première épouse mais rien qui ne vienne entacher le plaisir de (re) découvrir le début de la carrière du cinéaste sous un forme qui lui rend clairement hommage.
LA MUSIQUE:
C'est quoi :LES BOURREAUX MEURENT AUSSI
C'est de qui ? Hanns Eisler
La Couv':
Déjà entendu chez B.O BD? Oui.
On peut écouter ?
Ca donne Quoi ? Tout comme Lang, Bertolt Brecht a fui l’Allemagne Nazie pour trouver refuge aux States. Les deux hommes collaborent sur ce film d’espionnage, seul scénario du dramaturge pour le grand écran hollywoodien (seul tourné en tout cas), dont la musique est confiée à Hanns Eisler, lui aussi exilé germanique qui, durant les années 20 et 30, a composé pas mal de musiques de scène pour Brecht.
Pour ce scénario d’espionnage tendu, modèle du genre qui sait aussi bien jouer des codes et passages obligés que prendre son temps là où l’on s’attendrait à une action bien plus soutenue, Eisler, élève de Schönberg et adepte entre autre du dodécaphonisme, écrit une partition qui, elle aussi, sait faire la part belle au suspense tout en l’exprimant via des phrasés, des arrangements et autres thématiques souvent bien plus complexes que ce qu’on a l’habitude d’entendre sur du fim d’espionnage.
Son travail lui vaudra d’ailleurs une nomination à l’Oscar cette année là (qui échouera à Alfred Newman).
Un panaché d’ambiances souvent sombres mais aux tessitures captivantes que cette B.O qui, dans l’ensemble, se marie bien avec ce Fritz Lang en BD..
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