Ca donne Quoi ? Des milliers d’années après que la race humaine ait finalement anhiliée toute possibilité de vie sur Terre, les rares descendants encore vivants errent dans l’espace infini à bord d’un gigantesque vaisseau nommé le Renaissance.
Poursuivis par des ennemis extra terrestres, nos lointains descendants décident d’envoyer une mission sur les reste de la Planète Bleue afin de récupérer une emprenite digitale de Léonarde De Vinci afin de le cloner et de créer un être de génie capable d’inventer des armes à la hauteur de leurs adversaires.
Dans cet ambitieux album au format adéquat pour apprécier la beauté des compositions de Stéphane Levallois, ce dernier nous donne à suivre en parallèle les dernières heures du génie de la Renaissance en proie aux doute, et les premières heures de cette créature née de l’adn de l’artiste/inventeur, véritable humain 2.0.
Alliant avec une rare maestria fond et forme, pour ce récit entre biographie et SF - avec en fil conducteur de nombreuses œuvres de De Vinci - Levallois alterne les atmosphères et les techniques en fonction des époques évoquées, passant d’un noir et blanc parfois rugueux que n’auraient pas renié les grands auteurs latins du médium (Breccia en tête) à un sépia réaliste expressif détaillé.
Si la narration peut parfois s’avérer un rien brusque dans ses transitions, Léonard 2 Vinci est un exercice de style étonnant, se plaçant parmi les meilleurs opus de la collection des Bandes dessinées du Louvre qui comptait déjà quelques très bons titres.
LA MUSIQUE:
C'est quoi :CELLO CONCERTO N°2
C'est de qui ? Penderecki
La Couv':
Déjà croisé dans le coin? Une fois ou deux.
On peut écouter ?
Ca donne Quoi ? C’est enfoncer des portes ouvertes que de dire qu’aujourd’hui le monde du cinéma n’arrive pas à se réinventer, préférant utiliser ad-nauséam les même recettes éprouvées (et parfois pas forcément réussies) du passé.
J’en veux pour nouvel exemple l’utilisation faite, au fil des années et dans des genres aussi multiples que divers, d’une ou deux œuvres de Krystof Penderecki, révélées avec brio par deux monuments du cinéma fantastique, à savoir l’Exorciste de Friedkin et Shining de Kubrick, et que l’on va ré entendre jusqu’à plus soif durant les quatre décennies suivantes.
Et pourtant le reste de la discographie du compositeur polonais est au moins aussi riche et intéressante, d’un point de vue musical comme « illustratif ».
Le concerto pour violoncelle que j’ai choisi pour accompagner Léonard 2 Vinci est de nature à enterrer bien des B.O de film d’épouvante de ces dernières années.
Avec ses glissandi de cordes donnant aux instruments une stridence parfois insoutenable, ses micro-intervalles inventives, ses résonnances en canon, ses alternance de calme et de fureur musicale le tout porté par une unité thématique et mélodique forte, il donne à l’album conceptuel de Levallois une dimension épique qui, surtout sur les séances du futur, est tout à fait intéressante.
Déjà croisés sur le site? Dufaux oui, Terpant aussi je dirais.
Une planche:
Ca donne Quoi ? Suite à une sanglante bataille contre les troupes cosaques, Roger de Tainchebraye est défiguré à jamais.
Dorénavant il portera un masque qui lui vaudra le surnom de Nez de Cuir et qui ne l’empêchera pas, bien au contraire, de vivre une vie de libertin débauché et cynique.
Jusqu’à ce qu’il rencontre Judith de Rieuses, jeune femme pure et vraie dont il tombe amoureux, pour leur plus grand malheur à tous les deux.
Jean Dufaux trouve dans le texte de De la Varende terreau fertile à sa verve romantique, le background napoléonien permettant à Jacques Terpant de réaliser de superbes planches que ce soit dans les paysages bucoliques, les intérieurs riches ou encore une belle galerie de personnages.
On regrettera peut être que ce Barry Lyndon à la française n’ait pas plus de pages qui auraient donné plus de matière épique ou aventureuse mais on ne pourra reprocher aux auteurs d’avoir su faire souffler l’esprit passionné du roman.
LA MUSIQUE:
C'est quoi : JANE EYRE
C'est de qui ? D. Marianelli
La Couv':
Déjà entendu chez B.O BD? Oui une poignée de fois.
On peut écouter ?
Ca donne Quoi ? Je reste persuadé qu’aujourd’hui, peu de compositeurs ont réellement l’occasion de s’exprimer, de faire montre de leur talent, ceci du en grande partie au fait d’une production de plus en plus formatée qui attend des partitions lambda qui rentrent dans des carcans musicaux.
Heureusement Dario Marianelli, au fil d’une carrière parcourue de projets parfois risqués parfois balisés, a su développer une vraie identité d’écriture notamment sur des films où la romance est souvent le maître mot.
Sur cette récente adaptation du Jane Eyre de Charlotte Brönte, il livre une suite de thèmes aux tessitures riches, dominés par un violon soliste inspiré et, surtout, exploité sur une large échelle.
Marianelli retranscrit également l’aspect dramatique et gothique de l’histoire via l’intervention de la harpe et du piano ainsi que, dans une moindre mesure, les instruments à vents.
Si cette B.O sonne plus classique que certains des grands scores de son auteur (Agora, V pour Vendetta, …) il n’en possède pas moins cette classe romantique indéniable qui est la marque des grands.
Ca donne Quoi ? Ça sent la fin de parcours pour la communauté du Grass Kingdom avec l’arrivée de forces gouvernementales lourdement armées qui veulent capturer celui qui semble être le tueur psychopathe responsable de la vague de crimes qui a frappé la région depuis plusieurs années.
Si Robert et le reste des habitants du Royaume sont prèts à défendre chèrement leur indépendance, Bruce de son côté est parti enquêter à Cargill où il fait de terribles découvertes sur les Humbert père et fils et sur la véritable identité de l’assassin.
Kindt et Jenkin concluent leur trilogie noire de façon aussi spectaculaire que morbide avec d’un côté l’affrontement armé entre militaires et assiégés et de l’autre l’inexorable avancée vers les révélations.
Grass Kings confirme être un récit fort, riche de ses études de personnages comme de son background atypique et sauvage.
Assurément une autre image de l’Amérique.
LA MUSIQUE:
C'est quoi :MEMENTO
C'est de qui ?D. Julyan
La Couv':
Déjà entendu dans le coin? Une paire de fois je dirais.
On peut écouter ?
Ca donne Quoi ? S’il a touché à tous les genres, de la fantasy à petit budget à l’épouvante bis en passant par la comédie et même le film de guerre, c’est avec Christopher Nolan que David Julyan a probablement produit ses meilleures B.O.
Après deux courts métrages ensemble, nos deux compères sautent le pas du grand écran avec Memento thriller psychologique tendu et nerveux construit de façon non linéaire.
Julyan, adepte des mélanges de technique, prend le film à contrepied en gardant une unité chronologique à son score où acoustique et électronique font plutôt bon ménage même si cette seconde catégorie se taille la part du lion.
Le compositeur crée des atmosphères stéréoscopiques et stressantes qui ne sont pas parfois sans faire penser à certaines compositions de Nine Inch Nails, le combo de Trent Reznor, lui aussi passé à la B.O depuis quelques années.
Apothéose de noirceur musicale et bédéphile garantie avec le couple du jour !
Ca donne Quoi ? Il est probable, et je leur présente mes excuses par avance, que les auteurs de Mécanique du Fouet, me feront grief de chroniquer leur album au sein d’un cycle bd érotique.
En effet si leur évocation de la vie d’Eugénie Guillou - jeune femme du début du siècle dernier qui passa de bonne sœur à tenancière de maisons closes, amatrice d’expériences sadomasochiste- contient des images assez explicites, la réduire à une BD de genre serait aussi facile que trompeur.
Véritable destin de femme en miroir d’une époque et de mœurs, Mécaniques du fouet raconte la désillusion d’une jeune fille rentrée dans les ordres qui y découvrira que l’église n’est que le reflet des vices de la société et qui, évincée de son couvent, se reconvertira dans le commerce du plaisir, des plaisirs même ; les plus coupables, les moins avouables ; jusqu’à ce que la police viennent y mettre un terme et qu’Eugénie disparaisse de la circulation.
Christophe Dabitch, a visiblement été happé par son héroïne, au point même qu’à un moment les rôles s’inversent et notre scénariste devient acteur de sa propre œuvre le temps de promettre à son héroïne malheureuse de la canoniser.
Les chapitres sont entrecoupés de réflexions et témoignages personnels sur la création cathartique de cette biographie qui immerge plus encore si c’était possible le lecteur.
Esquisses, tableaux amorcés, dessins superposés, encres sauvages, couleurs fauves, dessins « à la manière de »…l’artiste argentin Jorge Gonzalez multiplie les techniques, dépassant le cadre de la bd classique pour proposer une partie graphique aussi torturée et tourmentée qu’à pu l’être son sujet pour un résultat parfois saisissant.
LA MUSIQUE:
C'est quoi :LA NUIT TRANSFIGUREE
C'est de qui ?A. Schoneberg
La Couv':
Déjà entendu chez B.O BD? Non
On peut écouter ?
Ca donne Quoi ? Œuvre contemporaine de l’époque à laquelle vécut Eugénie Guillou, la Nuit Transfigurée, écrite pour un sextuor de cordes, est probablement une œuvre charnière chez Schoenberg.
Celle où il s’affranchit de l’ombre imposante de ses maîtres à penser – Brahms, Wagner – et où il s’inscrit dans un post-romantisme où les passions sont exprimées plus farouchement, où le lyrisme un brin pompier des anciens est mis à mal par un jeune artiste de 25 ans qui n’hésite pas à aller jusqu’aux limites de la tonalité (Schoenberg sera d’ailleurs plus tard un fervent amateur du dodécaphonisme).
L’alternance entre passages tout en retenue et envolées mélodiques poignantes fait de cette Nuit Transfigurée, ode à l’amour envers et contre tout, une pièce très en phase avec Mécaniques du Fouet.
Ca donne Quoi ? Xerxès, avec Holly Terror ou encore un prochain Sin City a longtemps été une des arlésiennes de Frank Miller.
A une époque en effet il ne se passait pas six mois sans que l’auteur mythique d’œuvres majeures du comics US telles 300, Dark Knight ou encore Ronin annonce qu’il bossait sur des « suites » sans que rien ne suive sur le long terme.
Entre temps il s’est essayé, avec peu de réussite soyons honnête, au grand écran (pour une fort oubliable adaptation du Spirit d’Eisner) a vu ses propres œuvres adaptées au cinéma (300, Sin City,…) et a été victime d’une bien sale maladie.
Mais tout arrive et, à grands renforts de tambours et trompettes (de guerre) voici que le « prequel » de 300 débarque chez nous.
On y assiste à l’affrontement de l’empire Perse de Darius et de la Grèce puis, suite à l’assassinat du despote à la prise de pouvoir de son fils, Xerxès donc, et sa tentative de vengeance mise à mal par le plus grand des adversaires Alexandre (le grand donc).
Graphiquement l’artiste a changé, on s’en serait douté. Exit Lyn Varley –ex madame Miller- aux couleurs pour un rendu plus infographique.
Si le traitement des visages laisse parfois dubitatif, Miller n’a rien perdu de sa force d’évocation quand il s’agit de faire dans l’épique, dans le rentre dedans.
Dès le troisième chapitre par exemple, exit les cases traditionnelles pour une suite d’illustrations pleines pages baroques, façon peinture chaotique, avec des protagonistes aux postures et costumes dignes de super héros.
Sans avoir la puissance de 300, Xerxès (et, non, on ne s’appesantira pas sur l’éventuel sous-texte des deux œuvres) est un retour en force d’un artiste majeur, certes loin de sa superbe d’antan mais avec un style graphique et narratif toujours aussi original et unique en son genre.
LA MUSIQUE:
C'est quoi :KONG SKULL ISLAND
C'est de qui ? H. Jackman
La Couv':
Déjà entendu chez B.O BD? Une poignée de fois oui.
On peut écouter ?
Ca donne Quoi ? Si l’on peut décemment faire notre deuil d’un film décent sur King Kong à l’avenir, il faut reconnaître que cette version, entre clins d’œil appuyés (à d’autres longs métrages avec le grand singe) et référence originale (au Heart of Darkness de Conrad par exemple) n’est pas totalement le ratage attendu.
Au rayon des atouts du film on gardera aussi la B.O, signée Henry Jackman, pourtant élève du peu recommandable Hans Zimmer, qui s’amuse ici à faire des rappels aux travaux d’illustres prédécesseurs comme Goldsmith, tout en gardant des sonorités actuelles via entre autre l’usage de la guitare électrique et de percussions rentre dedans au possible.
En soi on trouve pas mal de similitudes entre les scores des deux 300 versions ciné et le travail de Jackman sur Kong Skull Island. Les cuivres y sont grandiloquent (voire pompiers parfois), les cordes, si moins présentes, montent souvent dans les tours et l’impression générale, du moins sur les scènes d’action ou de présence de créatures (oui, notre gorille géant n’est pas le seul habitant de l’île en question), est d’entendre un score de fantasy des années 2000 (comprendre « qui en a » mais un rien bas du front).
Une partition plus intéressante en tout cas que ce que le compositeur a pu produire pour la poignée de films de super héros sur lesquels il a œuvré.
Assez de sauvagerie et d’épique pour aller avec cet inattendu Xerxès !
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Conseils d'écoutes musicales pour Bandes Dessinées
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"...ces illustrations sonores. On apprend toujours quelque chose avec elles. Y compris sur des œuvres qu'on a soi-même écrites." Serge Lehman. (La Brigade Chimérique, Metropolis, L'Homme Truqué)