28 mai 2016
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L’épouvante, Bernie Wrightson ça le connaît. C’est par là qu’il a débuté, dans le mythique House Of Mystery chez DC et dans les publications similaires du principal concurrent (Marvel pour ceux qui ne suivent pas au fond !). c’est dans l’épouvante encore qu’il s’est fait un nom, avec la co-création de Swamp Thing popularisé ensuite par Alan Moore, (on y reviendra) et enfin c’est là qu’il a persisté et signé via l’illustration magistrale du Frankenstein de Mary Shelley (dont nous avons d’ailleurs chroniqué la suite, parue il y a peu en VF). Consacrons donc notre cycle L’Artiste Du Mois à ce grand monsieur du comics, avec des ouvrages à l'inverse de la chronologie pour une fois, et que, sans plus attendre, le spectacle commence :
LA BD:
C'est quoi : FREAKSHOW
C'est de qui ? Jones & Wrightson
La Couv':
Déjà croisés par ici? Oui.
Une planche:

Ca donne Quoi ?Inspiré par des artistes comme Frank Frazetta, avec qui il partage une science du rendu du mouvement et de la dynamique des postures, Wrightson a notamment fait les grandes heures des anthologies Creepy et Eerie. Quelques années plus tard, il retrouve son compère de toujours, le scénariste prolixe Bruce Jones, pour une histoire comme les deux hommes en ont le secret.
Freakshow, comme son nom l’indique, parle d’un spectacle ambulant de créatures difformes, humains rejetés par la société qu’un brave homme recueille afin de leur donner une vie et, histoire de gagner de quoi manger, expose brièvement aux badauds des villes et villages qu’ils traversent. Une jeune femme croise la route de la caravane et fait un bout de route avec eux, bientôt une idylle nait entre nos deux tourtereaux et mère nature leur offre un bébé. Las, notre bon samaritain est un ex-alcoolique qui, en proie à un intense stress durant l’accouchement de sa belle, se laisse aller à la boisson. Ivre mort, il va commettre l’irréparable, et, comme dans toute bonne histoire d’horreur qui se respecte, son crime ne restera pas impuni.

Développer le concept des histoires courtes à chute, classique du genre, sur plus de 50 pages pouvait paraître risqué mais le métier de nos deux compères fait la différence. Jones, bien moins bavard qu’à l’époque des récits des anthologies citées ci-dessus, pousse son scénario dans les retranchements de l’épouvante et du tragique permettant à Wrightson de livrer une de ses œuvres les plus abouties que ce soit en matière de réalisme des décors, de précision du trait ou encore d’expressivité corporelles et faciales. Tout dans Freakshow respire le malsain et la peur, l’artiste, qui assure dessin, encrage et couleur, se surpasse littéralement et le résultat ravira tout lecteur d’horreur qui se respecte.
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LA MUSIQUE
C'est Quoi ? LA MASCHERA DEL DEMONIO
C'est de Qui ? L. Baxter
La couv'

Déjà entendu chez nous? Oui
On peut écouter?
Ca donne Quoi ? Le film qui fit connaître Mario Bava au grand public, à qui pas mal de réalisateurs vouent un véritable culte, est sorti aux States un après sa diffusion en Europe, dans une version édulcorée (comprendre que la censure avait fait disparaître les scènes trop explicites niveau violence) et, fait plus rare, avec une B.O différente.
En effet, le public américain étant à l’époque (mais je ne pense pas qu’il ait beaucoup évolué, loin de là) considéré comme peu enclin à l’originalité, le distributeur fait appel à Les Baxter, qui sort tout juste de la composition du House Of Usher de Corman, pour écrire un score moins alambiqué et « artistique » que celui qui accompagne le film (et que l’on doit à Nicolosi).
Baxter applique sciemment les codes du genre, à base de cordes qui n’hésitent pas à se faire stridentes, de cuivres sourds et menaçants, de percussions qui déboulent, et autres passages obligés. Une poignée de pistes plus calmes et mélancoliques atténuent un peu le sentiment général d’une B.O fort calibrée mais on ne peut plus évidente sur une lecture comme Freak Show.
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Une chronique de Fab
26 mai 2016
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09:32
LA BD:
C'est quoi : LE CONCILE DES ARBRES
C'est de qui ? Boisserie & Bara
La Couv':
Déjà vus ici? Oui, ensemble et séparément.
C’est édité chez qui ? Dargaud
Une planche:

Ca donne Quoi ? Il me tardait de retrouver le trait si particulier de Nicolas Bara depuis la sortie du Chant des Malpas (déjà dans la collection Long courrier chez Dargaud), mon désir a été exaucé puisque le voilà à nouveau aux coté de son scénariste pour un récit où fantastique et aventure font bon ménage, le tout parsemé d’une pointe d’humour.
Au XIX° siècle, un duo d’enquêteur peu assortis, spécialisés dans les enquêtes surnaturelles, est confronté à un cas de disparition enfantine au sein d’un hôpital au personnel suspicieux. Leurs investigations vont les amener à affronter l’esprits de druides, passés dans des arbres effrayants et dotés de vie.
Si le scénario est assez classique et prend quelques raccourcis un peu faciles, la partie graphique relève l’ensemble de fort jolie façon, entre la colo bien choisie et une narration experte.
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LA MUSIQUE
C'est Quoi ? THE WITCH
C'est de Qui ? M. Korven
La couv'

Déjà entendu sur B.O BD? Non
On peut écouter?
Ca donne Quoi ? Lalo Schifrin aimait à dire que la B.O fait 70% du film. Et en effet, combien de longs métrages célèbres doivent en grande partie leur réussite à un thème et/ou une ambiance musicale ? De Star Wars à Il était une fois dans l’Ouest en passant par Le Parrain, 2001 ou Easy Rider, certains films ne seraient définitivement pas les même avec une autre B.O.
Mark Korven, enfant du rock et du jazz, connaît bien ses classiques et sait aller pêcher ses influences là où il faut. Pour mettre en musique ce fils fantastique se déroulant dans l’Amérique du XVII° siècle où une famille de colons isolée va être la proie d’une sorcière, le canadien fait appel au spectre de Ligeti et de Bartok mais c’est surtout l’ombre de Penderecki qui plane sur pas mal de pistes.
Combinant des voix éthérées quand elles ne semblent pas possédées à des stries de cordes parfois redoutables et des percussions quasi tribales, le compositeur livre une B.O habitée et entêtante, parfois extrême, parfois trop référencée mais d’une rare puissance évocatrice. Les 70% sont amplement remplis…dommage que les 30 autres aient fait défaut.
Certains trouveront, probablement à raison, que la musique retenue est un peu extrême pour ce Concile des Arbres, mais son aspect horrifique parfois expérimental, croyez moi sur parole, comble largement les bémols du scénario.
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Une Chronique par fab
23 mai 2016
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15:51
LA BD:
C'est quoi : NUAGES ET PLUIE
C'est de qui ? Loo Hui Phang & P. Dupuy
La Couv':
Déjà lus sur B.O BD? Oui, ensemble et séparément.
C’est édité chez qui ? Futuropolis
Une planche:

Ca donne Quoi ? Après le western, Loo Hui Phang reste dans la littérature de genre avec ce nouvel album qui flirte avec le fantastique et le mythe des vampires.
Désabusé et perdu, Werner, soldat rescapé de la Première Guerre Mondiale qui vient de se terminer, s’est exilé en Indochine où il se fait embaucher dans une étrange fabrique peuplée d’ouvriers hébétés. Bientôt il va faire la connaissance de la fille des maîtres, aussi sensuelle que dangereuse.

Si le contexte change radicalement de son prédécesseur, Nuages et Pluie n’en n’est pas moins tout aussi intriguant et s’intéresse une fois encore aux rapports des corps, à la passion, à la soumission, avec une poésie parfois malsaine mais toujours aussi inspirée que le trait décalé, fuyant, comme hésitant même parfois, de Philippe Dupuy rend encore plus dérangeante.
Dans la grande tradition des histoires de fantômes chinois, la scénariste, comme elle l’avait fait avec L’Odeur des garçons affamés, s’approprie un univers pour y développer son univers si personnel.
LA MUSIQUE
C'est Quoi ? IMAGO MORTIS
C'est de Qui ? Z M. De La Riva
La couv'

Déjà croisé chez nous? Oui
On peut écouter? Dans son intégralité même :
Ca donne Quoi ? C’est dans les vieilles marmites qu’on ferait les meilleures soupes ? A voir si l’on s’en tient à cette production internationale de la vieille Europe qui, outre marcher sur les plates bandes d’un genre en vogue en Italie il y a des lustres –le Giallo pour ne pas le nommer- tire des ficelles aussi grosses que possible même si l’efficacité est au rendez-vous.
Coté score, De La Riva lorgne lui plutôt du côté du répertoire gothique. L’espagnol, comme ses compatriotes Navarrete ou Velasquez, connaît ses classiques et utilise grand orchestre symphonique et chœurs pour exprimer l’aspect terrifiant du scénario : début menaçant mais étouffé, montée en puissance inexorable et sommets de terreur sont les principaux ingrédients de cette B.O généreuse (une trentaine de pistes) où le thème principal est bien exploité et où pas mal d’autres pistes sont intelligemment exploitées.
Parfois un peu extrême pour Nuages et Pluie le score s’est cependant souvent révélé des plus intéressants.
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Une chronique de Fab
16 mai 2016
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14:30
LA BD:
C'est quoi : LADY MC LEOD. L’INCONNUE DE JAVA.
C'est de qui : Sergio Alcala-Perez, Jean-Blaise Djian & Nathaniel Legendre
La Couv':
Déjà croisé sur le site? Oui, ensemble même.
C’est édité chez qui ? Cerises et Coquelicots
Une planche:

Ca donne Quoi ? Mata-Hari, personnage haut en couleurs s’il en est, danseuse devenue espionne et exécutée à la fin de la Première Guerre Mondiale, n’avait jamais eu, bizarrement, les honneurs de voir sa vie évoquée en BD. Le mal est réparé puisque Djian et Legendre, après un récit de fantasy jeunesse des plus sympathiques, changent du tout au tout de sujet et font de la néerlandaise (si, si !) le personnage principal de leur nouvelle série.
Cela étant, si vous vous attendiez à un récit d’espionnage classique, vous en serez pour vos frais, en effet le duo de scénaristes a décidé de mâtiner son récit d’une touche de fantastique.
Alors qu’elle se produit pour la première fois à Paris Mata Hari semble cacher un bien lourd secret, c’est du moins ce que se dit le Capitaine Ledoux, amené à enquêter sur d’horribles meurtres perpétrés dans les coulisses du spectacle.

Le style graphique de Sergio Alcala-Perez tient autant du fumetti expressif que de certains comics US tout en ayant une personnalité marquée qui est un vrai plus sur ce premier tome, rajoutant au rythme de la narration. Un mélange de genres qui plaira aux amateurs de fantastique bien mené.
LA MUSIQUE
C'est Quoi ? THE RED DANUBE
C'est de Qui ? M. Rozsa
La couv'

Déjà entendu dans le coin? Sérieusement ?
On peut écouter?
Ca donne Quoi ? Film dans la mouvance des longs anti-communistes qui fleurirent au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, The Red Danube ne brille ni par son impartialité ni par son scénario des plus manichéen. Reste une musique au cordeau du maestro des maestro, j’ai nommé Miklos Rozsa, qui opte pour un thème dédié aux personnages soviétiques, avec des couleurs qu’un Prokoviev n’aurait probablement pas reniées. Néanmoins le compositeur ne se départit pas de ce qui a fait son succès et la magnificence de l’orchestration et les envolées de cuivres lyriques et mélodies romantiques font bon ménage.
Certes parfois un brin pompeux pour le genre (on a l’impression sur certaines pistes d’entendre des bouts du Cid ou du Roi des Rois, c’est dire !) ce score est un régal à bien des titres et un vrai bonus à la lecture de Lady McLeod dont il relève pas mal d’ambiances.
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Une chronique de Fab
10 mai 2016
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10:04
LA BD:
C'est quoi : RITUELS
C'est de qui : Alvaro Ortiz
La Couv':
LA BD:
C'est quoi : RITUELS
C'est de qui : Alvaro Ortiz
La Couv':
Déjà lu sur le site? Oui
C’est édité chez qui ? Rackham
Une planche:

Ca donne Quoi ? Si effectivement on peut commencer à résumer l’intrigue de Rituels en parlant de ces deux jeunes espagnols qui emménagent au dessus d’un appartement vide, occupé par le stock d’un antiquaire qui va tellement intriguer l’un deux que ce dernier va y entrer par effraction et faire une découverte surprenante, c’est clairement rester à la surface de l’iceberg.
En effet, cette situation est surtout le véritable début d’une suite de dominos hallucinante qu’Alvaro Ortiz, que l’on savait doué pour le mélange de genres, va raconter en mélangeant plusieurs récits, en dressant un puzzle narratif hallucinant et jouissif qui enterre sans soucis ceux qui avaient eu tendance à le vulgariser (Tarantino en tête).
D’une jeune femme qui s’exhibe devant sa webcam pour arrondir ses fins de mois, à un vieux bonhomme construisant une statue gigantesque en secret au milieu des bois, en passant par une relecture éclair assez grandiose de la Genèse ou encore un homme se liquéfiant littéralement en public, l’auteur espagnol entraine son lecteur ébahi dans un imbroglio scénaristique dont les ramifications, au fur et à mesure qu’elles se rejoignent, laissent entrevoir la trame principale (qui, avouons deviens presque secondaire tant la forme prend le dessus).

Cerise sur le gâteau, une fois encore le style graphique si particulier de l’auteur ajoute encore une strate au décalage de Rituels qui confirme tout le bien qu’on pensait d’Ortiz, en passe de devenir un auteur majeur.
LA MUSIQUE
C'est Quoi ? HAIL CAESAR !
C'est de Qui ? Carter Burwell.
La couv'

Déjà croisé chez nous? Oui
On peut écouter?
Ca donne Quoi ? Dire que Burwell est très demandé ces temps ci est un euphémisme quand on voit son actualité. Ces derniers mois il a mis en musique une poignée de films aussi différents que possibles, l’un des plus intéressants étant, à mon goût, la dernière comédie (réussie) des frangins Cohen.
Collaborateurs de longue date, les trois hommes se connaissent sur le bout des doigts et le compositeur sait toujours répondre aux attentes musicales des réals’. Ainsi pour Hail Caesar ! Burwell a du écrire une poignée de pistes à insérer dans une B.O où l’on retrouve aussi bien des pièces classiques qu’un chant des Chœurs de l’Armée Rouge, tâche en apparence peu aisée surtout que, le film se déroulant à Hollywwod et incluant des scènes de faux longs métrages d’époque (romaine entre autre comme vous l’auriez deviné), il lui a fallu produire des choses très variées.
Néanmoins, l’un des champions de l’underscoring de son époque s’en sort une fois encore fort bien, évitant le sensationnalisme et favorisant des mélodies discrètes mais marquantes dans un panorama musical varié.
C’est cette diversité qui va bien avec Rituels même si, évidement, certaines pistes seront à zapper histoire de ne pas être en complet décalage.
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Une chronique de Fab