14 juin 2016 2 14 /06 /juin /2016 11:52

 

 

 

LA BD :

 


C'est quoi : L'AFFAIRE DES AFFAIRES : CLEARSTREAM

 


C'est de qui : Laurent Astier & Denis Robert

 

 

La Couv':

Les coulisses du pouvoir / L'Affaire des affaires : Clearstream Vs. Les Hommes du président

Déjà lu sur le site ? Oui pour Astier (avec une interview !)

 

 

C’est édité chez qui ? Dargaud

 

 

Une planche :

 

 

 

Ca donne Quoi ? Entre 2001et 2002, Denis Robert publie les essais Révélation$ et La Boîte noire qui mettront le feu aux poudres et feront bientôt exploser la première affaire Clearstream…

 

Mettez-moi devant une bonne intrigue politique bien tordue, du genre House Of Cards, et je la bois comme du petit lait. En revanche, faites-moi passer du champ de l’humain, même dans ses plus terribles bassesses, à celui de l’économie… c’est plus fort que moi, je décroche ! C’est dire la qualité du travail effectué par Denis Robert et Laurent Astier, qui est parvenu à me tenir en halène pendant plus de 700 pages. Le fait que leur BD adopte en partie le style des grandes detective stories des années 70, dans la lignée des Hommes du président (dont l’affiche orne d’ailleurs le bureau de Denis Robert), n’y est sans doute pas pour rien. Une influence bien venue que vient renforcer le dessin en noir et blanc d’Astier, dont le trait vif, comme croqué dans l’urgence de l’enquête, mais non dépourvu de détails, rappelle davantage celui de la BD indépendante américaine qu’européenne.  

 

Avant de me lancer dans la lecture du pavé que constitue l’intégrale de L’Affaire des affaires, je dois confesser que ma connaissance de cette sombre histoire de blanchiment d’argent, aux proportions internationales, se limitait à une liste anémique de mots-clés : Luxembourg – le juge Van Ruymbeke - Villepin – Sarkozy… Vagues souvenirs de reportages entr’aperçus au JT, il y a pas mal d’années. Elle était tout autant lacunaire concernant la personnalité de Denis Robert, avec qui je ne savais même pas partager une origine mosellane et un passé messin !

 

 

 

Le récit débute en 2006, soit au beau milieu de l’imbroglio politico-financier de l’affaire Clearstream 2, lancée par celle (non moins célèbre) des "frégates de Taïwan". Elle effectue ensuite un flashback en 1995, peu de temps avant que Denis Robert ne quitte son poste à Libération, pour retrouver sa pleine liberté d’expression et se consacrer à l’écriture de son second roman. Chassez le naturel… Le jour où il tombe par hasard sur l’évocation de la mise en examen d’Henri Emmanuelli pour trafic d’influences, le journaliste décide de se remettre lui aussi "aux affaires".

 

De fil en aiguille, de témoignages secrets en divulgation de listings compromettants, de Metz à Paris en passant par Genève ou Luxembourg-Ville, l’enquête avance, inexorable, vers ce qui allait devenir l’affaire Clearstream, avec toute la nébuleuse de corruptions qu’elle va mettre  au jour et qui réussira presque à emporter l’enquêteur dans son maelström. Pour autant, celui-ci sera condamné à trente et un procès en diffamation de la part de la chambre de compensation luxembourgeoise et lynché médiatiquement par une partie de ses collègues, notamment la rédaction du Monde, dirigée alors par Edwy Plenel.                 

 

Menée sans temps mort, didactique mais jamais assommante, L’Affaire des affaires n’oublie pas pour autant de développer et d’approfondir la personnalité de son "héros". En se présentant comme un monsieur Tout-le-monde obstiné, qui ne crache pas sur le bon pinard, les soirées entre copains et essaye de concilier comme il peut vie de famille et investigation chronophage, Denis Robert ne tire jamais la couverture à lui, ramène adroitement son récit dans ce fameux "champ de l’humain" que j’évoquais et se détourne ainsi de la voie du pensum économique cryptique sur laquelle il aurait pu s’engager.

 

 

 

Intelligente, rigoureuse, limpide, captivante et non dénuée d’humour, L’Affaire des affaires se doit d’être lue par tous ceux qui veulent commencer à comprendre les rouages d’un capitalisme qui, cinq ans seulement après la perte par Clearstream de tous ses procès intentés contre Denis Robert, se vautre désormais dans la boue des Panama Papers.

 

 

 

LA MUSIQUE :

 

 

 

C'est Quoi ? LES HOMMES DU PRESIDENT

 

 

C'est de Qui ? David Shire

 

 

La couv' :

 

 

Déjà croisé chez nous ? Oui

 

 

On peut écouter ?

 

 

 

Ca donne Quoi ? Adaptation de l’essai d’investigation publié en 1974 par Bob Woodward et Carl Bernstein (récompensé par le prix Pullitzer quand chez nous, Denis Robert a d’abord été condamné par la cour d’appel de Paris, avant que le sérieux de son enquête ne soit reconnu… appelons ça la « French Touch »), le film d’Alan J. Pakula retrace l’enquête des deux journalistes du Washington Post (incarnés à l’écran par Peter et Steven… pardon Robert Redford et Dustin Hoffman) qui révèlera l’affaire du Watergate.

 

Plusieurs critiques ont établi un parallèle entre l’affaire Clearstream et celle qui conduisit à la démission de Richard Nixon. Pourquoi pas. Une chose est sûre, la BD de Laurent Astier et Denis Robert, en tant que mise en récit du travail de ce dernier, évoque forcément, par son sujet, le film de Pakula, allant même jusqu’à le citer ouvertement au détour de quelques cases dans le bureau de Denis Robert.  

 

Afin d’orchestrer son enquête, le réalisateur de Klute fait appel à David Shire. Celui-ci connaît bien son affaire pour mêler tension dramatique palpable et sonorités jazzy sophistiquées, puisqu’il a officié également sur les excellents Les Pirates du métro de Joseph Sargent et The Conversation de Francis Ford Coppola. Sa musique anxiogène vient prolonger la tension qui se dégage à la lecture de L'Affaire des affaires en même temps qu'elle permet de souligner un peu plus sa parenté avec le film de Pakula. La boucle est bouclée. 

 

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Une chronique de Lio

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