et Sfar
Dernier tome, à ce jour, des aventures de Socrate le demi-chien, Œdipe à Corinthe recycle la formule initiée dans les deux épisodes précédents qui consiste à mettre dans un shaker des éléments empruntés ici et là à la littérature grecque antique (mythologie, épopée, tragédie…) pour voir ce qui en sort. Sfar et Blain s’attaquent maintenant à la figure d’Œdipe - largement « popularisé » par la pièce de Sophocle – dont ils nous comptent la naissance et les nombreuses problématiques qu’elle implique.
Les premières pages restent fidèles à l’histoire originelle : le roi de Thèbes apprenant qu’une malédiction pèse sur son fils, qui deviendra un jour un parricide et un enculé de sa mère, charge l’un de ses soldats de l’emmener loin de sa cité pour le sacrifier. On connait la suite, le soldat, ne parvenant à se résoudre à exécuter lui-même sa sombre besogne, suspend le bambin par les pieds à un arbre pour le laisser mourir (procédé nettement plus humain, on en conviendra). A partir de là, Socrate va entrer en scène et n’aura de cesse d’essayer de faire sortir le mythe des rails de la Destinée, en assurant lui-même (avec l’assistance d’une prêtresse d’Athéna), et contre l’avis de Zeus, l’éducation de l’enfant.
La BD ayant dès lors bifurqué sur un arc narratif parallèle, Sfar s’en sert pour brasser différentes thématiques qui ont moins à voir avec l’Œdipe antique qu’avec son complexe psychanalytique théorisé par Freud des siècles plus tard. Evidemment toutes ces notions, largement survolées, sont abordées avec un humour et des dialogues bien sentis, parce qu’on n’est pas là non plus pour se prendre la tête ! Le scénario s’apparente donc à un joyeux foutoir qui n’hésite pas, dans son dernier tiers, à faire revenir Héraclès, maître de Socrate dont la personnalité bourrine et la misogynie débridée l’apparentent davantage au Beauf de Cabu sous testostérone qu’à un demi-dieu de l’Olympe.