LES LECONS POLITIQUES DE GAME OF THRONES.
Si aujourd’hui je ne me déplace aux urnes que par acquis de conscience, afin d’endiguer l’inexorable et malodorante montée du fascisme ordinaire véhiculé par le FN (si d’aventure après cette phrase nous avons perdu quelques lecteurs ce n’est pas très grave, ils étaient de toute façon Persona non Grata en ces lieux), je regrette sincèrement que la politique en France soit faite par des dinosaures énarques complètement étrangers aux problèmes du peuple qu’ils entendent diriger.
A contrario, nos voisins espagnols que nous n’hésitons pas à critiquer à la moindre occasion, pourraient nous en remontrer avec Podemos, parti né des mouvements sociaux du début des années 2010-baptisés des « indignés »- et constitué d’intellectuels et de professeurs issus du peuple, et bien décidé à appliquer une démocratie économique où corruption, népotisme, abus de pouvoir et autre acquis scandaleux n’auront pas lieu d’être (belle utopie diront certains, cyniques réalistes, mais reconnaissons leur au moins la vocation d’essayer).
Si je me permets cette parenthèse politique, que je referme aussitôt car le sujet ne me passionne pas plus que ce qu’il m’interpelle d’habitude, c’est parce que, non content de s’installer dans le paysage politique espagnol, les membres de Podemos ont également pondu un bouquin très instructif sur la politique dans…Game Of Thrones !
En effet le leader du parti est aussi un inconditionnel du show de HBO et avance que le succès de ce dernier n’est pas simplement dû au cocktail de fantasy adulte avec son quota de sexe, de violence et de bestioles mais également en grande partie à cette parabole impressionnante sur la lutte de pouvoir, sur la rébellion contre les ordres établis et la prise de conscience des peuples de l’inexorable chaos vers lequel les entrainent leurs dirigeants.
Etablissant de nombreux parallèles manifestes et bien vus entre la situation européenne et mondiale d’aujourd’hui et celle dans GOT, comparant les stratégies des personnages clés aux préceptes politiques de spécialistes de la question, de Machiavel à Lénine en passant par Hobbes, les auteurs du bouquin, une quinzaine d’intellectuels espagnols plus ou moins proches de Podemos, s’emploient à démontrer qu’il ne serait pas illusoire que certains soient tout à fait applicables ici et maintenant. Edifiant !
GAME OF THRONES, UNE METAPHYSIQUE DES MEURTRES.
Politique et Philosophie vont souvent de pair, ainsi l’autre ouvrage que nous abordons aujourd’hui est écrit par Marianne Chaillan, une professeure de la seconde matière, qui, elle aussi, se penche sur la série et les questions existentielles et/ou métaphysiques abordées via ses personnages, ses scènes cultes et autres situations épineuses.
Paru aux éditions Le Passeur.
Ici aussi l’on croise Hobbes et Machiavel, mais aussi Kant ou encore Epicure, voire des penseurs plus proches de nous et même si, dans l’absolu, on est plus en présence d’un ouvrage à ranger dans la catégorie « La Philosophie pour les Nuls » que dans celle des exposés universitaires, les exemples et explications ont l’immense mérite de faire preuve d’une clarté limpide et ne nécessitent pas d’avoir à être relu trois fois pour être assimilés (ceux qui ont eu la malchance comme votre serviteur de se frapper des purges comme L’Ethique à Nicomaque ou le Discours de la Méthode savent de quoi il en retourne !).
L’auteure aborde très sérieusement des sujets épineux comme l’euthanasie, l’homosexualité ou encore l’inceste, pesant chaque fois le pour et le contre à force d’analyses et d’extraits, et amenant, via des exercices de réflexion ludiques rattachés à GOT, des questionnements plus profonds qu’il n’y paraît.
Game Of Thrones, une métaphysique des meurtres, sort la philosophie des sanctuaires des universités pour la ramener dans la boue de Westeros et, par la même, dans notre réflexion au quotidien.
Vulgarisation passionnante d’une matière par essence assez abstraite, l’ouvrage de Marianne Chaillan est un fantastique moyen de « joindre l’utile à l’agréable ».
Bon, et bien maintenant plus que deux mois à attendre pour la suite...
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Une chronique de Fab